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L'Actu
BABYLON OU LA FASHION DÉMESURE
Par Amandine Rouhaud | le jeudi 19 janvier 2023
Avec Babylon, sorti au cinéma le 18 janvier, Damien Chazelle (Whiplash, La La Land) fait la part belle à l'exubérance et à la folie pure des années 1920. Le film est une plongée vertigineuse dans le monde fantasmé d'Hollywood où les carrières se font et se défont à l'heure où le cinéma connaît des chamboulements technologiques. Devant l'œil du réalisateur, le cinéma connaît un renouveau et l'époque aussi. Détails.
Vertigineux. Haletant. Essoufflant. Pendant un peu plus de 3 heures, le nouveau long-métrage du réalisateur américano-français Damien Chazelle (à qui l'on doit notamment La La Land ou encore Whiplash), Babylon, embarque le public dans un tourbillon effréné. Au centre du film porté par Diego Calva, Brad Pitt et Margot Robbie, se trouve purement et simplement le cinéma en lui-même. Cette fresque au rythme on ne peut plus soutenu fait revivre les premières heures d'Hollywood, du cinéma muet aux nouvelles évolutions technologiques, mais pas que. Entre des fêtes démesurées et décadentes, Babylon met en lumière le portrait croisé de trois personnages qui, aveuglés par les projecteurs, sont prêts à tout pour réussir quitte à complètement sombrer.
Avec une intrigue qui démarre au début des années 20, le public pourrait s'attendre à une plongée dans l'époque des années folles à la manière de Gatsby Le Magnifique de Baz Luhrmann. Mais il n'en est rien, ou presque. Chez Damien Chazelle, l'exploration de cette époque qui intrigue se fait passionnée, excessive, déroutante. Dans des fêtes démesurées où un éléphant, clou du spectacle, débarque, l'éther et autres drogues dures sont monnaie courante. Les corps sont dénudés et les orgies, non dissimulées. Dans ce charivari de fêtes extravagantes, l'esthétique des années 20 est réappropriée de façon contemporaine par le réalisateur.
Oubliez les robes retro Charleston à franges ! Dans Babylon, Margot Robbie - alias Nellie LaRoy - se pare de robes mi-cuisse aux décolletés vertigineux ou encore d'un coordonné mini-jupe et crop-top à dos nu en sequins. Pour certains, le film pourrait même fricoter avec l'anachronisme tant les codes propres aux années 20 sont, parfois, réinventés.
Si, au sortir de la première guerre mondiale les années 20 représentent une bouffée d'air frais, côté mode, c'est la révolution. Symbole d'une vraie liberté retrouvée, les robes se raccourcissent et les corps se dévoilent. Une idée que Damien Chazelle semble avoir pris au pied de la lettre, si l'on observe les différents looks portés par l'héroïne.
Une figure demeure pourtant un symbole fort des années folles : celle de la garçonne. Campée par Li Jun Li, Lady Fay Zhu représente cette femme affranchie qui joue avec les codes des genres dans son numéro de cabaret. Dans le film, il émane irrémédiablement de ce personnage une sensualité et un glamour certain. Haut de forme, costume, main gantée et chignon bas viennent entremêler les genres pour une prestation qui ne manque pas de marquer : l'esthétique léchée et délicate de la scène se met au service de ce symbole de l'époque qui inspire.
Mais si les figures féminines ont une place proéminente dans l'œuvre de Damien Chazelle, il est impossible de passer à côté de Brad Pitt, en Jack Conrad, ex-acteur vedette sur la pente descendante et Diego Calva, alias Manny Torres, jeune passionné qui compte bien se faire sa place dans l'univers du cinéma. L'un a connu la gloire et les soirées les plus folles d'Hollywood, l'autre, plus modeste, en rêve. Veston, smoking, nœud papillon et bretelles à bouton sont les indispensables de l'époque pour fricoter avec le gratin du cinéma et s'y faire une place.
Excessif et jouissif, Babylon est une véritable fresque qui dépeint toute la démesure du Hollywood des années 20. Si le montage et le rythme sont on ne peut plus soutenu, les quelques scènes d'accalmie agissent comme de véritables bouffée d'air frais qui viennent ajouter une autre dimension à ce récit teinté d'humour absurde. Avec une esthétique qui lui est propre, des décors et des costumes léchés, ce film signé Damien Chazelle offre une plongée vertigineuse au cœur de trois destins qui se font et se défont sur fond de révolution technologique pour le 7e art. Par sa technique, son histoire et sa certaine mise en abyme, Babylon est une véritable ode au cinéma tout entier qui ne laissera, à coups sûrs, pas indifférent.
Ces looks ont été pensés par Vilson, notre personal shopper